vendredi 6 novembre 2015

Jeje !!! (« Bonjour, ça va ? »)



Ça y est, on commence (enfin) à essayer de parler quelques mots en shimaoré (euh pour l’instant pas plus que les doigts d’une main). On se rend compte que les mahorais apprécient vraiment quand on essaye de s’intéresser à leur culture en parlant quelques mots de leur langue : leur sourire à l’entente de nos « Kwezi bweni » (bonjour madame),  « Kwezi Mognye » (bonjour monsieur), « Kwezi Koko » (bonjour grand-mère),  « Kwezi bakoko » (bonjour grand-père) en est la preuve. On ne s’en rendait pas compte avant d’arriver à Mayotte, mais le français est vraiment une langue étrangère pour l’ensemble de la population. Ils parlent français uniquement à l’école. Chez eux, on parle en shimaoré, dans la rue on parle en shimaoré,  dans toutes les boutiques (superette, boutique SFR,…) on parle en shimaoré, les élèves entre eux parlent aussi en shimaoré s’ils ne s’adressent pas au professeur …
Du coup, on se rend compte que la barrière de la langue rend difficile la création de liens avec la population. S’ajoute aussi le fait que les mzungus (nous, les blancs)  ne restent ici que 3-4 ans pour la plupart (le temps d’un contrat de travail), alors les mahorais doivent légitimement se demander « A quoi bon créer des liens ? »
 


Ça fait trois mois qu’on est ici. On se rend compte que cette courte expérience nous a appris déjà pas mal de choses. On se fait souvent la remarque entre mzungus : que la vie est simple ici ! Il n’y a pas tous ces besoins que l’on se crée artificiellement  dans les pays occidentalisés (par ennui ?), et toutes les perversions que cela engendre (comparaison, jalousie,…). Les moments où l’on s’en rend le plus compte, c’est quand on voit jouer les enfants. Ils sont toujours en « bande de copains », 5 ou 6 à imaginer des nouveaux jeux avec les moyens du bord (création d’un hamac avec un vieux tissu entre deux arbres en bord de route, faire tomber les mangues des arbres en visant avec des cailloux, match de foot improvisé sur la plage avec des bambous en guise de cages,...). Ils n’ont rien mais semblent pouvoir tout inventer.  Pas d’interface numérique ici, les enfants jouent ensemble et non par le biais d’un écran. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils n’ont pas l’air malheureux.
Ce qui est dommage, c est que l’on sait déjà que, de retour en métropole,  conditionnés par le fonctionnement des gens autour de nous, on aura tout (?) oublié de nos belles réflexions.
On se dit alors que la départementalisation, ce n’est peut-être pas un cadeau pour eux. Les mahorais vivent chichement mais paraissent heureux. Est-ce qu’on va leur proposer une société comme la notre : une société anxiogène où la compétition et le profit sont les valeurs phares ? Bien sûr, la départementalisation a ses avantages, notamment un système de santé et d’enseignement de qualité.  Mais l’un dans l’autre, sont-ils gagnants ? Certains pourront dire « oui mais ils l’ont quand même votée cette départementalisation ! ». D’une  part, ils ne savaient pas à quoi ils disaient oui. A 8000 kilomètres de la France, ils n’ont pas eu les connaissances nécessaires pour faire ce choix. Ensuite, pour faire simple, départementalisation = argent (construction d’infrastructures, routes, tout à l’égout, établissements scolaires, hôpitaux…).  Comment dire non ?
Notre voisin est un réunionnais de 50 ans, il nous a raconté un soir que la Réunion de son enfance, c’est le Mayotte d’aujourd’hui. Il est venu ici pour retrouver ça, cette tranquillité, cette simplicité de vie qu’on lui a « volée ». Selon lui, la Réunion a grandement perdu de son identité, la population a changé. Une assistante sociale rencontrée à Mayotte nous expliquait que la Réunion était un fléau économique pour la France: beaucoup se sont arrêtés d’aller travailler dans les champs pour toucher le RSA ou le chômage. Ici, elle nous racontait que les mahorais ont droit aux aides (bien moins élevées qu’en France malgré le coût de la vie qui lui est… bien plus élevé !), mais ils ne font pas les dossiers pour les toucher, ils ne sont pas encore entrés dans cette démarche…  Quand ils ont besoin d’argent, ils disent qu’ils « bricolent » : ils peuvent par exemple s’improviser maçon et aller aider à la construction d’une maison quelques semaines, avant de trouver une autre bricole pour gagner un peu d’argent. 

Voilà mes quelques impressions, tout n’est sûrement pas  juste dans mes propos mais l’idée est là : n’est-on pas en train d’uniformiser les cultures suivant un modèle dominant qui pourtant, est loin de faire ses preuves ?

J’ai dû en perdre quelques-uns dans cette petite réflexion de comptoir, donc pour ceux qui voulaient des nouvelles du quotidien, les voici :) !

Après les multiples péripéties de Max (accident de scooter, infection alimentaire pendant une semaine,…), on a ENFIN commencé notre niveau 2 de plongée. On est descendu à 40 mètres et, mine de rien, on ne faisait pas les fiers ! A partir d’une certaine profondeur (dès 30 mètres), on peut ressentir ce que l’on appelle « l’ivresse des profondeurs ». La quantité d’azote que l’on a dans le corps nous rend clairement « pompette » ! On n’a pas du tout ressenti cet effet, mais apparemment certains se prennent pour un poisson et suivent leur nouvelle famille, un banc de mérous, en s’éloignant dangereusement du moniteur. Les quelques anecdotes que l’on nous a racontées nous ont bien fait sourire.

Vidage de masque à 40 mètres

27 degrés à 37.7m sous la mer: vous avez dit chaude?

Un chêne, espèce endémique du lagon



Une langouste



Dimanche dernier, on s’est inscrit à une course de pirogue à balancier avec des copains…
On ne savait pas trop à quoi s’attendre : qu’est-ce que c’est difficile à manœuvrer ! Et pas vraiment profilé pour la vitesse ! La course consistait en une boucle de 3km, il fallait partir de la plage en tirant la pirogue sur le sable avant de pouvoir monter dedans,  puis contourner un îlot et revenir sur la plage. Expérience folklorique !!!
Extrait du dialogue Agathe-Max pendant les 27 minutes de course :
Agathe, à l’avant : « Mais tu sais pas barrer où quoi ? »
Max, à l’arrière : « Tu rigoles ? Qui sait barrer de nous deux ?! »
Malgré tout, on est arrivés 3ème (et premier en mixte,  c’est ma petite fierté personnelle !) et on a gagné une sortie bateau et une plongée !
 

Notre pirogue de compet'!


Départ de la course

C'est parti!

On saute dans la pirogue!

L'arrivée des derniers concurrents




A bientôt les amis !


Agathe et Max
 





4 commentaires:

  1. Yes trop bon §
    et belle réflexion ;)

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  2. Vous avez de la chance tiens !! La numérisation de t out me désole ici. Les enfants ont la nuque qui se courbe et les jambes qui se ramollissement tandis que les adultes ne savent plus communiquer entre eux que par texto... J'envie votre riche expérience ! Profiter un maximum les amis!
    Thom

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  3. J'aime bien ce petit moment de philosophie dans le sillage de Jean-Jacques Rousseau...qui ne fréquentait pas le café du commerce. Cette réflexion sur leur "pauvreté joyeuse" face à notre "richesse futile et déprimante" nous est déjà venue lors de plusieurs de nos voyages.Elle nous laisse un vague goût d'insatisfaction tant elle met en lumière nos incertitudes ( et si nous avions tout faux ?) et notre impuissance (que faire ?).
    Et si, pour occuper vos longues soirées, vous relisiez "Tristes Tropiques" ! Bises à tous deux Pap

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  4. Salut!
    En vous lisant ça m'a rappelé bien des souvenirs de mon (court) séjour en Afrique. Beaucoup de points communs: les enfants qui jouent avec rien, les sourires des gens très pauvres d'argent mais souvent riches de souvenirs...et les questions q'on se posent inévitablement en voyant cette culture différente. Là-bas ils disaient par ex "Ici on tue le temps, en France c 'est le temps qui vous tue!". J'aimais bien. En tout cas sant sout rejeter de notre mode de fonctionnement habituel, c vrai que ca fait réfléchir, relativiser.
    Sans doute la "vérité" se trouve à mi-chemin, comme bien souvent, entre le progrès (médecine, éducation...) et la simplicité (partager une tasse de thé, une balade, un souvenir...ou une descente de kayak ;-) ).
    Vous aurez l'avantage d'avoir vécu les 2 extrêmes, ca vous aidera forcément à vous situer, et peut-être à éviter qqs pièges de la vie...
    En tout cas jolies photos sous-marine!!!!!
    Biz portez vous bien à bientôt!!

    Jojo

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