La vie suit son cours à Mayotte, entre boulot, sorties
bateau, plongées, randos, et repas entre amis. Maintenant que nous sommes bien
installés (on a nos meubles, internet,
le téléphone, le lave-linge !), on se sent bien chez nous.
Au boulot, on s'acclimate. Bien sûr, on ne connait
toujours pas le prénom de nos élèves. Ce qui donne « Hé toi là-bas, avec
le tee-shirt vert », « Oui,
toi, pieds nus, on a dit de venir avec des chaussures. Elles sont où les
tiennes ? » Agathe a même sorti un : « Hé toi, en noir,
vient ici ! » Le petit avait de l’humour, et lui a répondu « Hé
madame, qui ça ? On est tous en noir ici ». Sourires garantis.
Dans le nord, nos élèves sont plutôt sympas. Ils ne
répondent pas, et ne disent rien quand on les punit. Alors que dans les
collèges du côté de Mamoudzou, la capitale, on retrouve des comportements
d’élèves de banlieue de métropole. Insolence, violence physique… Normal, les
collèges sont pleins à craquer. Ça déborde d’élèves, ils sont jusqu’à 1800 dans
un même établissement (prévu pour en accueillir la moitié…). Nous, à côté, avec
nos 1300 élèves, on ne dit rien. On fait partie des « petits bahuts ».
Ce qui nous a fait bizarre, avec les élèves, c’est le
tutoiement. « Monsieur, tu viens voir s’il te plait ? ». C’est
original. Ça ne traduit aucune forme d’irrespect. C’est naturel, et ça nous
plait. J’ai eu droit à « Monsieur, t’es fragile toi » après m’être
brulé l’avant bras avec le frottement d’une sangle pour attacher les filets de
badminton. « Monsieur, t’as fait bac plus combien ? Ah, quand
même ?! Je croyais que pour faire ce que tu fais, il fallait juste
s’inscrire au collège ».
Parmi mes classes, j’ai une sixième où sont regroupés les
élèves qui ne savent pas lire ni écrire le français. Une instit accompagne les
profs dans chaque matière et assure un soutien pour ces élèves. En EPS, je n’ai
pas cette instit. Les élèves sont mignons. Quand je demande s’ils ont compris
les consignes, ils me répondent un grand « OUI ! » tous en cœur.
Cet aprem, en natation dans le lagon, je leur explique : voici le départ
dans le sable. Par équipe de trois, le premier court, entre dans l’eau, nage
jusqu’à la ligne de bouées, TOUCHE la ligne sans l’arracher, puis revient le
plus vite possible taper dans la main du second qui démarre. C’est une course. L’équipe
la plus rapide a gagné. C’est bon pour vous ? « OUI ! ». J’insiste
bien sur le « on TOUCHE la ligne de bouée, on ne l’attrape pas dans les
mains », car elle n’est pas fixe, c’est le maitre nageur qui l’a posée
pour marquer la limite de notre périmètre. Je lance le départ, ils sont six à
entrer dans l’eau en même temps. Arrivés à la ligne de bouées, j’en vois deux
ou trois qui la touchent du bout des doigts, et qui s’arrêtent. Je crie « demi-tour,
vite, il faut revenir toucher la main du suivant ». A ce moment arrive Mohamed,
le grand costaud, qui saisit d’une pleine main la ligne de bouées, la soulève
de toute sa longueur de bras et crie en l’arrachant « Ouais ! On a
gagné ! ». J’arrête la course, je les rassemble. « Les
filles, pourquoi vous n’avez pas fait le retour ? » Des grands
yeux me regardent. Mohamed, j’ai dit « on TOUCHE la ligne, d’accord ?
Puis on retourne vite vers son équipe ». Il me répond : « Toucher,
ok, courir vite, ok». Je pense qu’il a compris. On recommence, tout marche
à merveille. Ouf. C’était le premier exercice. Il en reste trois avant de faire
nager le deuxième groupe.
La semaine dernière, Agathe a expérimenté la rencontre
parents-profs de son collège. Elle a découvert qu’il fallait un traducteur, car
quasiment aucun parent ne parle français. C’était un de ses collègues, un prof
mahorais qui traduit le Shimaoré ou le Shibushi, les deux langues locales. Ce qui
est drôle, c’est qu’un village sur deux ne se comprend pas car ces deux langues
sont complètement différentes. Par exemple, notre village, Hamjago, parle le Shibushi
(dialecte d’origine malgache), alors que le village voisin, M’tsamboro, parle
le Shimaoré, la langue mahoraise.
On s'équipe avant de plonger |
Notre première sortie en plongée nous a motivé à nous inscrire
pour passer le niveau 2. On a eu l’occasion de voir des murènes, un
poisson-trompette, des tortues, des poissons en pagaille, et un requin nourrice
(le seul type de requin qui peut dormir planqué sous le corail. Les autres sont
obligés de nager continuellement, même pour dormir).
Poisson-trompette |
Agathe |
Gaterin oriental |
La murène... |
... qui montre les dents |
Poisson cocher |
Le requin nourrice, qui dort caché sous le corail |
Dimanche dernier, on a loué un bateau avec des potes qui ont
le permis (moi, je le passe très bientôt !). On est allé chercher des
baleines, car c’est la période où elles viennent prendre des forces avant leur
grande migration. On en a vu deux, mais d’assez loin. On a eu droit à un saut
intégral (certains n’ont vu que le splach de la fin, c’est mieux que rien…). On
n’était pas les seuls bateaux à les suivre à distance, et on les a agacées,
elles sont parties. Des dauphins sont venus jouer avec les vagues du bateau,
puis on s’est arrêté sur plusieurs plages, pour nager, pique-niquer, nager
encore…
On n'est pas les seuls à suivre les baleines |
Les dauphins qui nous suivent |
Petite pause sur une plage |
L’îlot Choizil, juste en face de chez nous. On aperçoit notre village au loin. |
Cette plage n’apparaît qu'à marée basse. On s'y est garé, elle était rien que pour nous! |
Cette semaine, on vient d’apprendre que le jeudi est férié.
En plus des congés français, s’ajoutent les congés des fêtes musulmanes. Jeudi,
c’est l’Aïd el kébir, donc on ne travaille pas.
Dans le prochain article, on vous présentera notre petit
chez nous…
A bientôt !
La vie est belle,
Max et Agathe.